Leliana Stancu
(Roumanie)
(Pseudonyme : VIOLINNE)
Triste fleur
Comme pour les âmes bien nées, la valeur
N’attend pas le nombre des années,
C’est ainsi que le mal vient; triste fleur,
Dans un désert d’idées,
Déluge de mots répandus,
Coeur perdu,
Tout passé,
Tout cassé…
Parmi des larmes
Je pars vagabonde,
Infinité de charmes,
Jusqu’au bout du monde.
Je passe
Je passe, voyageur solitaire, parmi les étoiles et je vais
Chercher l’inconnu…
Mes éphémères dieux sont seuls en moi, tu le savais,
C’est mon voyage, coeur nu.
Le soleil brille dans tes regards magiques,
Rêve sans visage,
Sur l’infinité des neiges des montagnes mystiques,
Pendant que ces versets sont mon seul équipage.
Belle pensée,dans mon oeil pluvieux,
Qui m’apporte, le plaisir qui tue, toujours froide,
D’un manteau de ce ciel poussiéreux
Je t’ai fait une ballade,
Perdue dans la pensée des nobles attitudes,
Pour d’autres mondes, sans temps et fierté,
Quand je serai seulement la mémoire de mes solitudes,
En attendant, pour nous, une prochaine volupté.
Je suis l’océan qui coule sans ma vie d’une seconde,
Qui s’envole, parmi des continents comme un nuage rond.
Ton pays est dans mes rêves,
Fragile comme une soirée d’été,
Et avec le vent qui brise tu t’enlèves,
Un étranger perdu vers l’éternité;
Peut-être sommes-nous le même rêve sublime,
Tu vis dans ma mémoire, pour y toujours durer,
Mais ce qui nous sépare c’est l’ abîme
De l’écart des chemins qu’on passe, sans se retourner.
Le printemps
Fantaisie sur la musique de Brahms
Dans ma vie de cellulose,
la révolution des bourgeons vient de commencer.
Dieu sourit à travers les fleurs des arbres,
le vent souffle la partition musicale
sur le portable des branches,
Marié avec l’infini,
Saturne s’est mis la bague.
Mon univers spirituel
est une orgie cosmique
de pétales dispersés.
Le vent emporte le cœur des fleurs,
la Terre est le berceau des couleurs,
l’arbre recueille la mémoire collective des feuilles.
Les cinq sens sortent sans défense
de la logique des choses simples.
Mon pays est cette pensée,
mon abîme est un asile pour des papillons.
Je me cache parmi les pensées comme le soleil dans les ombres,
Comme dans la rosée, les étoiles filantes.
Échappant d’un cercle effondré,
Le printemps devient une manière de vivre.
Une jonquille blanche tire toutes les ficelles de l’Univers
dans ce paysage où
l’amour est la forme prédominante du soulagement,
et les tempêtes solaires ne font pas peur
à ceux qui vivent dans le soleil.
Défiant la loi de l’attraction universelle
sur le fond gris des mémoires
la constance de la pierre brise les chaînes,
la gloire du matin est pendue à un crochet de la lune
flottante parmi les lys d’eau
éclairant de l’intérieur,
L’infini sort du lit de la pensée,
Des ombres se fondent dans les roues du temps,
Des fleurs blanches, confuses, se réveillent sur les branches
comme un caprice de la nature,
Leur parfum explore des pays lointains,
L’espace cosmique trompe la pureté de la tige fragile
où augmentent les mots éthérés
en divines scintillations,
La voûte lourde des pensées repose sur des branches
comme sur les touches d’un ancien piano,
et un violon se croit cerisier en fleurs,
dans ma vie de cellulose.
Les éternels commencements
Le sens unique c’est ennuyeux,
même s’il s’agit d’une route qui monte
Nous quittons des passions, des gens, des idées,
pour de nouveaux commencements
sur des routes cachées
– Comme des destinées en réserve –
jeu d’enfants tracé dans le sable
et souvent chemins fermés,
mais qui serait arrivé au bout, pour s’en soucier?
Quel est le but d’une passion,
d’un amour,
d’un rêve?
Le but est la fin.
On quitte des routes qui grimpent
en sens unique et ennuyeux
vers la mort
en trompant le destin
sur les chemins étourdis
des éternels commencements
des passions
des amours
des errances…
Avec une inutile timidité,
Quand la vie se tait et tu n’oses pas l’inquiéter
En passant sur le bord des chemins du détour
on sème du temps,
pour y augmenter des éternités,
que nous laissons derrière
quand l’éternité devient routine
même si nous n’aimons pas les chemins
qui montent sans nous
Et parfois, nous sommes seulement le décor
du sens unique.
La vie
– des pensées au milieu de la nature –
La rivière ne sait pas combien de larmes elle porte
sur son chemin vers la mer,
même si elles sont à vous …
Ne regrettez-vous pas la neige
parce que vous vous ennuyez du soleil,
mais l’harmonie
est mieux que l’ennui du bien.
Comment peut-il y avoir un point de montagne, sans l’écart autour de lui?
Ainsi, sont le comble du bonheur,
et l’abîme de la douleur.
Passent aussi
un grand amour, une grande douleur, un rêve …
mais sans eux, combien sommes-nous petits?
Et ce n’est rien:
les petites choses sont en plus temporaires…
L’intelligence, l’éducation, la culture nous enseigne ce qui est bon, juste et beau;
le coeur nous montre à quoi bon les avoir.
Va à l’absolu,
regarde à travers le prisme des grands nombres,
Rêve la pure lumière,
même si tout est relatif …
Le ruisseau suit son cours;
– l’amour, le destin, la vie… aussi –
Pensez-vous que la pierre reste la même, après le passage de l’eau?
Nous non plus,
nous ne serons plus les mêmes …
Nous sommes des structures d’avenir,
non pas des instantanés du temps,
nous avons des besoins qui diffèrent d’un âge à l’autre;
ce qui nous a suffi hier,
aujourd’hui nous est étrange,
parce que nous nous transformons à chaque instant,
et différemment,
pas "les deux" de manière identique,
même si nous avons commencé de la même façon, un jour …
Chacun de nous trouve sa propre vie
à chaque instant,
au cours duquel des rêves disparaissent
et de nouveaux s’y produisent.
La beauté de l’amitié est comme un parfum de fleurs;
même si la fleur a disparu, garde son parfum dans ton âme,
où rien ne s’estompe,
les cendres sont seulement de la poussière d’étoile …
Quand il vous semble que la tempête a changé votre vie,
rappelez-vous qu’elle ne le pourrait jamais,
même si le cours de la vie était ou non prédéterminé.
Et puis, ce ne serait qu’une tempête.
Comme le soleil
supprime les traces de la tempête,
un sourire guérit les blessures;
apprenez à pardonner
à vous-même.
Il semble que ruisseau et ruisseau peuvent bien s’entendre,
quand ils réunissent leurs eaux en un seul cours;
que feuille et feuille peuvent bien s’entendre,
quand elles se réunissent en un seul soupir;
Oh, combien de fois j’ai pensé mieux comprendre
la voix d’un ruisseau
ou celle d’une feuille,
que celle d’un homme …
Il neige
Il neige parfois, avec nostalgie,
Quand les nuits et les jours s’enfuient lentement, à peine,
Il neige avec des mots, dans la poésie,
Il neige avec des étoiles qui brillent dans mes gènes.
Sous mes lourds pieds, la neige pleure à voix basse,
Et le bonhomme de neige pense
À l’ancienne odeur de pomme au four,
Que le vent porte, parmi les avant-toits, à son tour.
Des fenêtres fermées m’entourent à tout lieu,
Où les tristes couchers de soleil battent,
Des mots provisoirement remis en jeu,
Et la lune parmi les glaçons qui pendent.
Je ferme la pelle à main comme les gourmets,
Quelques larmes parmi les mains, en sortent,
Un flocon de neige traverse des sonnets,
Dans lesquelles, le vent fatigué, s’endort.
Pendant que je lutte en un dernier effort,
Les lourdes neiges me rappellent, après la gloire,
Que le temps est lui-même en retard, qu’il a tort,
Et je ne vais trouver que votre ombre, dans ma mémoire.
Il semble, cependant, une poutre en arc d’été,
Parmi l’éclatement des nuages qui sonnent le clairon;
Sur les pierres de la douleur, dissipé,
L’hiver draine comme un fleuve de larmes, en leur son.
Sur ma poitrine, comme une plaie embrassée,
Un morceau de ciel et un coin de la lune, je rassemble,
Et dans mon rêve, pour la première fois, éclairée,
Main dans la main, nous partons ensemble.
Chaque soir
À la place de mes armes,
Au-delà de nos absences,
J’ai mis les larmes
De nos silences;
Au lieu de la douleur qui s’efface
Je tire le grand rideau noir
Sans plus qu’une trace
D’espoir;
Je m’enfuis comme un voleur,
Dis, comment j’aurais pu faire face?
Ça me fait peur,
Entre le feu et la glace…
Je suis l’ombre
Qui frôle la détresse,
Chaque nuit blanche, chaque jour sombre,
Vient ma tristesse;
De mon état sauvage,
J’ai souvent passé mon tour
Vers l’orage
À donner tant d’amour,
Et l’enfer est l’espoir
De mon coeur,
Je meurs chaque soir,
Illusion de douceur.
Il faut chercher
Quand les yeux sont aveugles,
il faut chercher avec le coeur,
Car on sait que chercher, c’est ça le bonheur
La chance est un hasard,
le bonheur, une vocation ronde;
Se réveiller, c’est se mettre à la recherche du monde.
Parmi Hugo et Musset
Là où finit la terre, tu voles, aigle hautain,
et moi je chante, rossignol, à mon tour
mais par tes yeux, je comprends, lointain
… on ne badine pas avec l’amour.
Poème triste
Pas de rêves ce soir, pas de larmes, pas d’amour.
La Lune, seule, s’en va sur un pic de montagne,
Dans la forêt, le silence, on regagne,
Et demain ce sera une nouvelle terne jour.
Le matin, même l’aurore semblera ridicule,
Tout sera désolant comme le temps qui s’en va,
Joustement comme il faut, à sa place, tout sera,
Le soleil apportant une nouvelle canicule.
C’est comme ça que l’été passera lentement,
Et puis, parmi tant de nuages, l’automne
Coulera sur les rues dans une pluie monotone,
Dans nos coeurs s’installera l’hiver permanent.
Il m’a dit
Un jour, il m’a dit: tu es belle.
Je l’ai regardé attentive,
J’étais son aimée très rebelle,
Toujours en départ préventive.
Un nuit, il m’a dit: reste, mon ange.
Je n’ai rien dit, j’étais prête
Déjà pour un autre rechange
Du rôle que la vie interprète.
Le temps est passé en silence,
Montant sur Golgotha ma croix,
Mais moi, depuis son absence,
Je n’entends que seulement sa voix.
Le poète
Quand ma vie devient
Un abîme d’Orient,
Et la nuit vient, elle-même,
Monotone et boème,
Quand les cieux tombent à terre
Dans une basse poussière,
Les étoiles et la lune
Cachent au-delà de la dune,
Sur un éclat du vent,
Dont je suis congruent,
Je me perds dans un mot,
Dans une rime, plutôt…
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