Claude Bardinet
(France)
ECOPOÉSIE TORRIDE
Tout n’est pas poésie dans la pensée scientifique ;
il y a énormément de mathématiques dans la bombe atomique.
À René Char pour À la santé du serpent, (1954 édition GLM, illustré par Joan Miro) « La poésie est de toutes les eaux claires celle qui s’attarde le moins aux reflets de ses ponts ».
Hermès au temps présent
Absurdité des temps présents
tout se dégonfle comme vol-au-vent
illusionnant même les enfants
qui ne savent plus d’où vient le vent
ni pourquoi et sans paravent
s’affichent tant de gens importants
Les menteurs ont du poil aux dents
ils parlent s’agitent éperdument
la jeunesse s’éclate en dansant
elle fait la fête énormément
Farfouille ma tête
mon alouette
virevolte folle
d’insectes alertes
Protège mon cœur
des vrais malheurs
d’insectes sans cœur
Hermès vole sur ses sandales
Il va séparant les serpents
Grand mage protégeant les sciences
chassant le complexe de Diane
humant myrte olivier pavot
tout en veillant sur son troupeau
et surveillant les voyageurs
Puis vers leur dernière demeure
conduit les âmes dans le malheur
Vénus lui fit Hermaphrodite
L’hymne à Hermès chante ses œuvres
utiles aux voleurs comme aux flics.
Colère d’Hélios, 1989
Agapes
Les dames firent voltiger les draps
puis leurs partenaires ironiques
furent invités en courtoisie
à un rituel non biblique
où l’on peut rire sans embarras
À la femme à La Pedeca
on dit Si C’est à Merida.
La Fuite, huile, 1991
Herpétologue diabolique
L’herpétologue fréquente les diables
invoquant les mots souterrains
rythmés au chant des batraciens
hululements bruits de reptiles
son décor est peau de lézard
son humour est rire ironique
Le verbicruciste aime les mots
mots nommés pour être croisés
croiser les doigts chasse les maux
si la mémoire est malmenée
les jeux de mots peuvent être beaux
même ceux dont le sens est faux.
Affrontement – encre, 1987
Quand les langages ont la parole
Le verbicruciste aime les mots
mots nommés pour être croisés
Le sens échappe à tout contexte
hormis sa place sur un tableau
La parole tourne en rond
comme rond dans l’eau
cernant les tourbillons
des Danaïdes tonneaux
Le vide est dans le cercle
magique des maux
que toutes voix projettent
Un chien vaut mieux que moins que rien
sur sa paille on est encore bien
Les pauvres plaignent notre cécité
l’indifférence en société
Le glouton soigne sa glotte
La pucelle soigne sa dote
Le bellâtre soigne son miroir
Le banquier son air macabre
Tous sont de gentils guignols
Oh ! ces mots sans échos
inertes et morts
paroles que nul ne porte
Ils content faits de culture
tout un chacun est sûr
Passé sans paraboles
niant la voie des Rroms.
Veuve de guerre – encre, 1987
Rroms
Le gadgo aimant sa gadgi
l’emmène voir danser les Rroms
Leur musique chasse les soucis
Leur danse fait valser les robes
La castagnette et le tambour
rythment leurs chansons d’amour
et puis soudain la guitare
laisse en l’air sa dernière note
car les flics sont là dehors
barrant les routes de l’espoir.
Le piège – encre, 1986
Au fil des vagues – encre, 1987
Paix n’est pas paradis
Ô ces visages livides
dont la face est solide
Et ces yeux qui regardent
par le travers des larmes
Fusillé du regard
je me croyais sans vie
Quand la paix sans espoir
étouffait nos envies
Que croire du paradis
où vivent les gentils
êtres sans foi ni loi
allant chacun pour soi
Paix n’est pas paradis
Mon combat c’est la vie
Pour ceux qui aiment les autres
Tout renoncement est faute
Juger flatte les égos
ferme les yeux aux maux
La lumière est outrage
pour tous les sans courage
Le chant de l’avenir
patrimoine émérite
appelle un devenir
d’horizons sans limites.
Mur de peur – encre, 1987
J’ai écouté la Terre
J’ai écouté la Terre et puis je fais
les questions réponses à sa place
En son nom je vous le redis
la fin des temps sera pénible
Nous avons franchi la limite
et connaîtrons l’épouvantable
Le poids de l’homme sur la planète
pose moins problèmes que ses déchets
son comportement exaspère
Des hommes vivant dans l’illusion
se battent pour traduire dans les faits
leur rêve qui est supposition
Seuls progressent ceux qui apprécient
les faits au poids des illusions
Je lance quelque part une amarre
J’espère même qu’elle s’attachera
à l’étoile à la bonne étoile
Trois filins seront nécessaires
pour dessiner ma trajectoire
Trois filins-vecteurs poétiques
Je sais qu’il reste fort à faire
Mes espérances sont oniriques.
Copyright : CLAUDE BARDINET
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